Dernier concert au Grand Théâtre de La Coursive à l'occasion des Francofolies de La Rochelle.19/07/2006
Les femmes à l’honneur pour ce dernier soir à la Coursive. Tout d’abord, celle qui fut révélée par les Francos, l’excellente Emily Loizeau et sa scénographie intrigante. Puis l’impeccable comédienne-réalisatrice, Agnès Jaoui qui livre une prestation un peu trop retenue.
Il y a du concept chez Emily Loizeau. Un énorme tourne-disque est posé devant la scène, une caméra retransmet sur un écran le vinyle en action. Suivront tout le long du concert, des traits rouges ondulés peints en direct par le batteur, un couple de mariés de pièce montée et une demie boule à facette.
Voix plus puissante que sur album, Emily Loizeau entame sa prestation par son refrain le plus connu : "A l’autre bout du monde". Disposée sur la gauche de la scène, derrière son piano, la chanteuse n’en est pas pour autant coupée du public. Dans le rôle de la petite peste, elle le bouscule même à merveille : "Si vous chantez faux, abstenez vous." Quelques instants plus tard. " Ben alors, vous chantez tous faux ?!" La protégée des Francofolies évolue dans un registre délicieusement suranné très influencé par l’univers du cabaret. Avec de multiples petites touches modernes, elle chante des chansons d’amour absolument pas ringardes et même drôlement piquantes. Femme de poigne qui ne s’en laisse pas conter, elle fait siffler, roucouler voir caqueter le public. En guise de rappel, deux titres sans micro, à quelques centimètres des premiers rangs. Un vrai régal.
D’emblée, Agnès Jaoui crée comme une zone tampon. Elle se juche sur un tabouret de bar, retranchée cinq bons mètres derrière le bord de la scène. La comédienne annonce alors, tout sourire : "un scoop, je vais chanter en espagnol." Boléro, son, valse argentine, fado, nuevo tango, swing manouche, elle déroule les différentes ambiances de son album. Entourée de trois guitaristes (cubain, argentin et argentin, tous rencontrés dans le quartier parisien de Belleville), elle aborde tous les styles traditionnels des musiques latines. La prestation tourne au cours de musique voire d’Espagnol ! Agnès Jaoui explique la plupart des textes : "des histoires d’amour, d’amour malheureux." Elle vit ses chansons comme un rôle au cinéma, la voix irréprochable et le corps chaloupant en rythme. L’ensemble est très appliqué, didactique même, mais on ne peut s’empêcher de penser qu’il manque un grain de folie. Comme sur ce titre composé par Elbicho bien en deçà de la démence originelle du groupe espagnol. En étant hautain, on se dit que les trois quarts des gens ne seraient pas aussi enthousiastes, s’ils n’avaient pas déjà vu la chanteuse sur grand écran. Mais d’un autre côté, la comédienne ouvre une grande porte sur une musique envoûtante, qui pourrait lui reprocher ?
Ludovic Basque